Eternelle réforme

Conscient du mécontentement des électeurs, appelés aux urnes tous les deux ans, Netanyahou a promis (une nouvelle fois), s’il est élu, de changer le système électoral israélien.

Benjamin Netanyahou (photo credit: REUTERS)
Benjamin Netanyahou
(photo credit: REUTERS)
Lors d’un discours de campagne au quartier général du Likoud, Benjamin Netanyahou a appelé la semaine dernière à une réforme du système électoral. Objectif affiché : restaurer la domination du Likoud et du parti travailliste comme les deux grandes formations du paysage politique israélien. La scène politique « est effritée en petites formations qui n’ont pas la capacité de diriger le pays. Et le problème va en s’accentuant », a constaté le Premier ministre. « En 66 années depuis la création de l’Etat, il y a eu 33 gouvernements – ce qui signifie qu’en moyenne chacun d’entre eux n’a pas survécu plus de deux ans. Cela nous a coûté des milliards, pas seulement en frais électoraux mais aussi en conséquence de politiques économiques instables. »
Netanyahou entend donc modifier la loi au lendemain du 17 mars, s’il est réélu à la tête du pays. Le président n’aura plus la prérogative de choisir le parti qui forme la coalition gouvernementale ; le parti ayant reçu le plus de voix se verra automatiquement doté de ce privilège. La logique derrière cette proposition, déjà soumise à plusieurs reprises : inciter des électeurs, qui hésitent par exemple entre le parti travailliste et Meretz, ou entre le Likoud et HaBayit HaYehoudi, à choisir respectivement le parti travailliste ou le Likoud. Cela ne signifie pas qu’il n’y aura plus de petits partis. Ceux qui représentent des minorités, comme les orthodoxes ou la population arabe, feront toujours partie du paysage politique. Mais l’objectif est que les électeurs israéliens soient encouragés à restaurer le système politique d’avant 1996, quand le parti travailliste et le Likoud recevaient à tour de rôle une large majorité de sièges à la Knesset.
Netanyahou veut également établir une loi selon laquelle une « super-majorité » de voix sera nécessaire pour faire tomber un cabinet. Dans l’espoir que cela permette de prolonger la durée de vie des gouvernements israéliens.
Améliorer la stabilité politique
Depuis la création de l’Etat, de nombreuses réformes ont été proposées pour améliorer la stabilité des gouvernements et les protéger du diktat des petits partis, dont l’influence est à chaque fois exacerbée puisque la survie des coalitions est souvent à leur merci. David Ben Gourion a régulièrement tenté d’abolir le scrutin proportionnel, préconisant de prendre exemple sur le système majoritaire britannique. « Je ne pense pas que l’apparition de 21 listes aux élections de la Knesset dans ce petit pays de 600 000 ou 700 000 habitants soit l’expression de la bonne santé de sa démocratie », déclarait-il déjà en 1949.
Mais le changement n’a pas encore eu lieu. En 2008, nouvelle tentative. Les membres du parti travailliste et ceux du Likoud ont soutenu d’une même voix une réforme ambitieuse qui recommandait que la moitié des 120 députés à la Knesset soient élus à un scrutin majoritaire, que le cabinet ministériel soit réduit à 18 postes, et que le seuil électoral, alors fixé à 2 %, soit élevé à 2,5 %. Mais les petits partis, religieux comme libéraux, ont à chaque fois déjoué les tentatives de réforme du système électoral. Ils seront les principaux perdants si Netanyahou poursuit son idée après le 17 mars, et s’y opposeront donc farouchement. En 2009 : le Premier ministre avait fini par se plier aux exigences de Shas et d’Israël Beiteinou et avait enterré sa réforme électorale pour le bien de sa coalition. L’histoire va-t-elle se répéter ?
Et même si le Premier ministre parvient à mettre en application tout ou partie des réformes qu’il soutient – comme la possibilité de nommer à des postes de ministres des personnalités n’appartenant à aucune formation politique, dans le but de réduire les intérêts personnels dans les décisions politiques – cela ne certifie pas qu’il arrivera à améliorer la stabilité politique ou la capacité à gouverner. Prenons le cas de l’Italie, qui en dépit de plusieurs tentatives de réformes électorales, continue de souffrir d’une instabilité politique endémique. Cela semble indiquer que des facteurs culturels sont en jeu. Comme si l’unique défi politique que certains gouvernements devaient soulever était celui d’améliorer leur propre stabilité.
Netanyahou a choisi une cause noble, mais rien n’assure qu’après les élections, au moment où il sera occupé à composer une coalition, il se souviendra de la promesse faite. Et même s’il s’en souvient et parvient à la mettre en œuvre, il n’est pas certain que ces mesures suffisent à atteindre les objectifs que le Premier ministre s’est fixés.
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