La France s’invite dans les salles obscures

Evénement incontournable des cinéphiles du pays, le festival du film français s’impose en Israël pour sa 11e édition

Scène issue du film  (photo credit: DR)
Scène issue du film
(photo credit: DR)

Il n’y avait aucune raison de s’arrêter en si bon chemin. L’ambassade de France en Israël et l’Institut français, en collaboration avec la société de distribution Eden Cinéma, sont une fois de plus heureux de pouvoir présenter au public israélien son événement populaire le plus attendu. Cette année, du 22 mars au 6 avril, dans les cinémathèques de Tel-Aviv et de Jérusalem, mais aussi de Haïfa, de Sdérot, de Holon et d’Herzliya, 21 films seront présentés en français avec des sous-titres en hébreu, afin de promouvoir le cinéma francophone, désireux de s’exporter à l’international. Des grands succès comme le dernier film de Cédric Klapisch, ainsi que la comédie Les garçons et Guillaume à table, auréolé notamment de cinq récompenses à la dernière cérémonie des Césars, seront présentés. Mais également des longs-métrages plus intimistes comme le film Je m’appelle Hmmm, le premier de la styliste Agnès B, ou encore le drame L’Enlèvement de Michel Houellebecq de Guillaume Nicloux.

Une cérémonie a notamment été organisée dimanche soir à la Cinémathèque de Tel-Aviv, à l’occasion de la présentation du dernier film de Guillaume Gallienne, dans le but d’expliquer l’intérêt de cet événement. Pour sa première présence à ce festival, l’ambassadeur de France en Israël Patrick Maisonnave a tenu, lors de son discours, à saluer cette « belle entreprise collective », tout en s’attardant sur l’importance de l’attrait du cinéma francophone dans l’Etat juif : « Les Israéliens aiment le cinéma français des années 1970 avec Belmondo, mais notre scène cinématographique est bien plus que cela, avec des jeunes talents à découvrir comme Albert Dupontel ou encore Nicole Garcia ». Son mandat étant particulièrement porté sur l’importance de la coopération économique entre les deux pays, ce dernier a également insisté sur l’apport que pouvait susciter à la France une amélioration de l’exportation du cinéma national : « Aucun genre n’est oublié dans ce festival et notamment deux coups de cœur seront présentés, deux documentaires qui abordent des valeurs proches de la France et d’Israël, comme la liberté d’apprendre, la fraternité et l’égalité des chances. Et cette opportunité existe car vous aimez notre cinéma, qui est pleinement reconnu dans le monde. Aidez-nous à faire connaître notre art visuel. Vous qui aimez le cinéma français, exigez le cinéma français. Les distributeurs israéliens doivent acheter un plus grand nombre de nos films. On peut déjà se réjouir d’avoir vu passer 40 coproductions franco-israéliennes ces dernières années. » Lors d’une autre allocution, une représentante de la mairie de Tel-Aviv s’est exclamée quant à la chance « qu’avait Paris de détenir plus de 300 cinémas ». Une aubaine selon elle pour la Ville Blanche, en déficit de salles obscures.
« Avec les Israéliens,
on peut se permettre d’être exigeant »
Attaché audiovisuel de l’ambassade de France, Olivier Tournaud est, lui, catégorique sur l’intérêt d’une telle manifestation : « La France bénéficie d’un public francophone très important en Israël, ce qui favorise ce genre de festival. En plus les Israéliens connaissent assez bien le cinéma français, on peut se permettre d’être exigeant avec eux et de présenter plus que des films attendus. Nous sommes satisfaits de la présence importante de films français sur les chaînes câblées du pays, mais on peut faire encore bien plus ». Invité d’honneur, Jean-Paul Salomé, réalisateur français de renom (Belphégor, les Femmes de l’Ombre etc.) est venu en Israël pour l’occasion, en tant que président de l’organisme Unifrance, chargé de la promotion et de l’exportation du cinéma français dans le monde, ainsi que pour présenter son dernier long-métrage Je fais le mort avec François Damiens et Géraldine Nakache. Ravi de sa présence dans l’Etat juif, ce dernier espère que ce festival sera une opportunité de choix pour permettre au grand écran français de conquérir de nouveaux marchés : « Le secteur du cinéma en Israël est vivant et en pleine expansion, il n’y a aucune raison que la France n’y participe pas. Le cinéma français dans votre pays, c’est vingt films proposés par an et près de 500 000 entrées, ce n’est pas rien ». Conscient de sa lourde tâche, Jean-Paul Salomé est sans équivoque face aux défis qui lui incombent : « En Israël, il y a trop de multiplexes au détriment des salles de quartiers, cela impacte sur la diversité de l’offre proposée, car les cinémas de grande taille préfèrent privilégier le cinéma hollywoodien, omniprésent. Nos entreprises comme Gaumont ou Pathé pourraient plus s’intéresser à ce marché afin de construire plus de salles obscures. La diversification des films est importante pour nos enfants. On ne peut pas que proposer Spiderman 14 ou Batman 12 ». Loin d’être un séjour balnéaire, Salomé compte aussi profiter de sa présence sur place pour favoriser la prise de contact avec les acteurs locaux : « J’ai rendez-vous avec des distributeurs importants du pays, mais, ce qui est particulier en Israël, c’est que les distributeurs et les exploitants sont les mêmes personnes, et que le marché du cinéma y soit détenu par seulement quelques protagonistes, c’est différent par rapport à la France ». Enfin, lucide quant aux résultats décevants de l’exportation du cinéma français en 2013 (-65 % d’entrées par rapport à l’année 2012), ce dernier a souligné que cette situation était due au succès démentiel de l’année 2012 : « Il y a deux ans, nous avions vu des exploits comme les films Intouchables et The Artist. 2013 n’était pas une mauvaise année mais juste une année normale ».
Quoi qu’il en soit, cet événement est l’occasion de graver à nouveau dans le marbre la francophonie, de plus en plus populaire en Terre Sainte. Un pont culturel conséquent avec le festival du film israélien organisé chaque année à Paris, qui a fêté cette année sa 14e édition. 
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