La voix des Arabes israéliens

Les partis arabes se sont réunis sur une liste commune et pourraient créer la surprise de ces élections…

Les partis arabes unis sur une même liste. Quel rôle joueront-ils dans la prochaine Knesset? (photo credit: MARC ISRAEL SELLEM/THE JERUSALEM POST)
Les partis arabes unis sur une même liste. Quel rôle joueront-ils dans la prochaine Knesset?
(photo credit: MARC ISRAEL SELLEM/THE JERUSALEM POST)
Sans grande surprise. La Cour suprême a tranché mercredi 18 février et rejeté la décision de la Commission centrale des élections d’interdire la candidature de Hanin Zoabi pour le scrutin du 17 mars. La parlementaire arabe siégera donc certainement de nouveau dans les rangs de la prochaine Knesset.
Le chef de file d’Israël Beiteinou, Avigdor Liberman voulait limiter la représentation arabe à la Knesset. Il a donc œuvré pour élever le seuil d’éligibilité à 3,25 %, dans l’espoir qu’au moins un parti arabe se retrouve hors du parlement israélien. Il visait en particulier le Balad, le parti de la députée Hanin Zoabi.
Mais contre toute attente, les partis arabes sont parvenus à faire front commun et à s’unir sur une seule liste. Résultat : tout porte aujourd’hui à croire que la prochaine Knesset comptera une quinzaine de députés arabes, contre 11 au sein du parlement sortant. La liste arabe unie pourrait ainsi être la troisième ou quatrième force politique du pays. Samedi soir, ils étaient plusieurs milliers, rassemblés à Nazareth pour le lancement officiel de la campagne.
Dans son discours devant le Congrès américain en 2011, le Premier ministre Benjamin Netanyahou s’était félicité de la participation de la minorité arabe à la démocratie israélienne. « Sur 300 millions d’Arabes au Moyen-Orient et en Afrique du Nord », avait-il rappelé, « seuls les citoyens arabes israéliens bénéficient de vrais droits démocratiques. » Des propos qui lui avaient valu une salve d’applaudissements.
Lors du dernier scrutin, 56 % des électeurs arabes ont mis un bulletin dans l’urne. Une augmentation de 3 % par rapport aux élections de 2009. Un taux record avait été atteint en 1999, avec 75 % de participation, avant de s’effondrer en 2001, plafonnant à 18 %. C’était après les révoltes d’octobre 2000, où 13 Arabes avaient été tués. Mais le 17 mars prochain, la participation dans le secteur arabe pourrait battre tous les records.
Personne n’est assez naïf pour croire que même s’ils se sont associés sur une liste commune, les partis arabes ont résolu leurs différends. De profondes divergences idéologiques les divisent : un camp représente l’agenda socialiste laïc et rêve de rassembler électeurs juifs et arabes sous une même bannière ; l’autre incarne la branche sud (plus modérée que la branche nord) du mouvement islamique israélien ; un autre encore pourrait être considéré comme le parti nationaliste palestinien, se battant plus pour un agenda séparatiste que pour une meilleure intégration des Arabes israéliens.
Tous les scénarios sont encore possibles
La population arabe israélienne n’est pas plus homogène que la population juive. Mais l’union était leur seule alternative. Difficile d’imaginer que 20 % de la population ne soit pas représentée à la Knesset.
Maintenant qu’ils ont uni leurs forces et que les sondages leur promettent une participation record au scrutin, la question est : comment la liste arabe unie va-t-elle influer sur les résultats de ces élections ? Les partis arabes pourraient recommander au président Reouven Rivlin de confier la formation du prochain gouvernement au chef de file du Camp sioniste Itzhak Herzog, ou bien s’abstenir. Il est certain qu’ils n’appuieront pas la candidature de Benjamin Netanyahou.
Second point d’interrogation : la liste arabe unie pourrait-elle faire partie d’une coalition menée par Itzhak Herzog ? Au jeu des alliances, ce dernier a récemment déclaré qu’il n’éliminait aucune possibilité, « de Meretz jusqu’à la droite », excluant ainsi les partis arabes. Herzog a insinué qu’il les appellerait à soutenir son gouvernement de l’extérieur, comme ils l’avaient fait avec Itzhak Rabin.
Il est évident qu’aucun député arabe n’acceptera de siéger au sein d’une coalition qui inclurait Liberman et son parti. Et il semble que beaucoup de députés arabes – principalement ceux issus des rangs de Balad – refuseraient de faire partie d’un quelconque gouvernement israélien. Mais l’union de leurs forces antérieure au scrutin ne les empêchera pas d’agir comme des formations distinctes après les élections. Il est ainsi parfaitement concevable que certains députés arabes décident de soutenir le gouvernement de l’intérieur. Le prochain cabinet pourrait ainsi avoir un ministre arabe israélien. Il y a déjà eu un ministre des Sports arabe, ainsi qu’un ministre adjoint à la Santé et même aux Affaires étrangères. Si Herzog forme le prochain gouvernement, il pourrait choisir d’y inclure des Arabes, à la place de Liberman. A un mois du scrutin, tous les scénarios sont encore possibles.
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